Verity Donahue appréciait le tennis, pas le sport en lui même mais les tenues : les petites jupette blanches et les basket qui allaient avec. C'est pour cela qu'elle avait, plus jeune, désirait prendre des cours. Lorsqu'en 2007, deux ans plutôt, elle avait trouvé une raquette griffé CHANEL Verity n'avait pas hésité deux secondes avant de se l'acheter. Trois cents cinquante euros ne représente que peu sur le compte en banque de ses parents. Puis finalement, il s'avéra qu'elle aimait vraiment y jouer et elle était plutôt douée. Certes elle n'aurait, ne le souhait pas non plus, jamais pu faire Roland Garros. Elle avait finalement délaissé les barres et miroirs de la salle de danse, que Verity pratiquait depuis sa plus tendre enfance, aux profits des cours et des filets. Mais c'était vraiment juste pour le plaisir.

La jeune londonienne n'ignorait pas la présence de terrains sur le paquebot, et s'en réjouit. Ainsi, parmi ses robes et ses talons elle avait emmené sa robe Adidas blanche favorite, qui lui allait à merveille, sans oublier cette fameuse raquette acquérie quelques années plutôt. Elle avait également fort insisté auprès de son ami, Enzo, de lui aussi emmené le nécessaire pour quelques parties. Depuis le départ, Verity n'avait pas eu encore l'occasion d'enfiler ses basket et taper dans quelques balles. Ce matin-là, elle s'ennuyait et était lasse de la piscine et du SPA. Non, elle voulait se défouler et ouvrant sa valise : elle vit la raquette. D'un geste décidé, elle l'attrapa puis enfila sa tenue de parfaite tenniswoman. Elle partit chercher son compagnon de voyage, le suppliant presque de l'accompagner et de faire juste deux parties. Résigné, il accepta.

Les deux amis venaient de terminer leur troisième partie. Verity, essoufflée, alla s'asseoir sur le fauteuil le plus proche. Elle entendit Enzo lui dire qu'il partait chercher à boire au bar, Verity n'y prêta guère attention. Elle avait les bras ballants, la tête penchée en arrière. Ses cheveux attachés négligemment en un chignon lui caressaient les épaules, à force d'être sous soleil ils avaient éclairci et était désormais plus proche d'un blond qu'autre chose. Le soleil faisait également ressortir ses petites taches de rousseurs de la jeune fille, lui donnant l'air d'une poupée avec sa peau laiteuse qui bronzait avec difficulté. Verity entendit des personnes arriver, elle se redressa et s'apprêter à protester que ce terrain était déjà pris. Finalement non, elle reconnut Jayson qu'elle avait brièvement rencontré quelques jours plutôt. Lui et ses amis commencèrent à jouer, la jeune femme suivait du regard la balle. S'arrêtait de temps en temps sur sa connaissance et dû avouer qu'il était très doué. Elle fut tellement absorbée par leur jeu qu'elle n'entendit pas Enzo lui annonçait qu'il allait prendre une douche, elle tenait dans sa main sa raquette et jouait avec la rose qui démarquait l'objet des autres. L'anglaise sourit légèrement au jeune homme, le seul qu'elle connaissait, quand elle remarqua qu'il venait de finir la partie.

Lorsque Jayson est énervé, lorsqu'il est triste, lorsqu'il a une accumulation de sentiments trop forts en lui, il faut qu'il se défoule. Certaines personnes chantent, d'autres dansent, d'autres dessinent, d'autres écrivent... Lui a touché à toutes ces choses, mais aucune n'a fait effet. Jusqu'au jour où il a essayé le tennis. Ca a été comme un coup de foudre. Alors depuis, lorsqu'il doit se défouler, il sait ce qu'il doit faire. Le jeune homme a juste besoin de taper dans la balle, de toutes ses forces, sans s'arrêter, jusqu'à ce qu'il soit complètement épuisé. Ce jour-là, Jay s'était levé du pied gauche, il n'était juste pas de bonne humeur. Vous savez, il y a des jours comme ça, où quelque chose bloque, quelque chose vous empêche de vivre. Bah c'était le cas du jeune tennisman, et il n'y avait qu'une seule solution : pratiquer son sport préféré jusqu'à mourir de fatigue.

Jayson appela donc un ami, qu'il avait rencontré quelques jours auparavant et qui jouait au tennis. C'était l'ami parfait dans ce genre de situation ! Evidemment, il accepta. Une heure plus tard, on pouvait voir deux garçons se défouler sur la balle. On ne saurait dire lequel des deux n'allait pas très bien, d'ailleurs les deux avaient surement besoin d'évacuer la pression. Bref; ils jouèrent sans s'arrêter pendant un certain temps, Jay ne saurait dire combien de temps, exactement. Une heure, deux heures ? Ca l'importait peu; le but était juste d'être fatigué à la fin de cette partie.

La partie toucha enfin - ou déjà - à sa fin. Jayson s'approcha du banc, sortit une bouteille d'eau de son sac, rangea sa raquette, prit son sac et dit quelques mots à son ami. En fait, il lui proposait de boire un coup au bar, mais celui-ci lui répondit qu'il avait à faire - avec un sourire pervers d'ailleurs, c'est pourquoi Jay en déduisit qu'une fille était sans doute dans l'affaire. Son ami lui conseilla alors de se retourner discrètement, car la fille du pari était derrière lui. Verity, en fait, elle s'appelait. Elle venait de Londres... Et Jay s'était présenté à elle comme un espagnol qui ne parlait pas très bien français (enfin, techniquement c'est l'anglais), et qui comptait emménager en Angleterre. C'est un pari idiot, certes, mais le jeune homme était bien décidé à le gagner ! Il s'approcha donc d'elle, et entama la conversation avec le même accent idiot qu'avaient ses voisins :

Hola ! Tu le .. joué el tennis ?

Jayson avait oublié qu'il était tout dégoulinant de sueur, ce qui pouvait peut être répugner la jeune blonde. Bon , en fait peut être que ça le rendait un peu plus sexy. Vous savez, certaines filles aiment les garçons plein de sueur..; alors peut être qu'elle en faisait partie ! Enfin, de toute façon, sa question était un peu idiote (il demandait si elle jouait au tennis, en passant x) ) puisqu'elle était habillée pour ! Mais c'était une fille, et parfois les filles n'aiment le sport que pour les vêtements, alors ça ne serait pas vraiment étonnant qu'elle s'habille de telle sorte juste pour regarder les autres jouer. En tout cas, elle marquait des points auprès de Jay, si elle aimait le tennis !

Jayson avait carrément affaire à une vraie Londonnaise ! Ce n'était pas plus mal, étant donné que, je vous le rappelle, le but de son pari était de faire croire à cette jeune assez longtemps qu'il était espagnol et qu'il comptait s'installer à Londres. Ou y voyager. En fait, il ne savait plus trop ce qu'il lui avait dit. De toute façon, en général on oublie ce genre de détails. Quoi que, il y a certaines personnes qui retiennent un nombre infini de détails, inutiles ou pas. C'est presque comme un don, enfin j'exagère un peu là. Dans tous les cas, ça n'était vraiment pas, mais pas du tout, le cas de Jay. Lui était plutôt tête en l'air, insouciant : la preuve il avait déjà oublié pourquoi il se renseignait sur Londres auprès de Verity.

Pendant un moment, durant lequel aucune des deux personnes ne parlait, Jayson en vint presque à regretter ce pari. La jeune blonde passait pour une énorme idiote dans l'histoire, elle n'avait rien demandé ! Si elle venait à apprendre la vérité, elle ne lui adresserait surement plus la parole. Le pire, c'est qu'elle était plus sympathique, alors c'était quand même assez dommage. A moins qu'elle le prenne bien, et qu'elle en rigole ! Si Jay était à sa place, il le prendrait vraiment mal... Passons; elle lui demanda quand est ce qu'il comptait venait en Angleterre. Là, il fallait que Jayson soit rusé, et qu'il trouve un moyen pour retenir la date qu'il allait lui annoncer. Pourquoi pas lui dire qu'il comptait passer juillet août là bas ? Les deux mois des grandes vacances. Et c'était parti pour un nouveau mensonge ...

Je vas aller dos mois à L'angletelle. Juillet et heum Août, c'est bien ça ? Je voulais savoir surtout le climat là bas. Tu sais, en Espagne el climat est tlès beau.

Bon, il fallait un changement de sujet radical là. Parce que; l'excuse de Jayson était tout simplement pitoyable, il n'y a pas d'autre mot. Et puis, c'était tout de même assez étrange, il parlait une fois presque correctement et une autre fois avec un énorme accent espagnol et des phrases mal construites. Il n'était vraiment pas bon menteur, et surtout pas bon espagnol.. Sous le coup de la panique, parce qu'il tenait quand même à gagner ce pari - après tout une soirée bien arrosée gratuite était à la clé ! - il lui proposa de boire un verre, un peu trop rapidement :

Tu veux boire ...

Il se reprit, très rapidement, parce qu'il avait parlé en tout bon francais - enfin, techniquement anglais. Les quelques mots de Jayson pouvaient encore passer inaperçus, il devait juste se reprendre naturellement :

Tu veux boile quelque chose ?